Crédit photo : Courtoisie 10e Ave
Originaire de Québec, Nancy Florence Savard amorce sa carrière professionnelle chez MusiquePlus, où elle occupe plusieurs postes, dont celui de productrice et réalisatrice. De retour dans sa ville natale en 1998, elle fonde 10e Ave Productions. En 2002, elle produit son premier court métrage de cinéma d’animation 3D, La Légende du sapin de Noël. En 2013, elle coproduit et réalise le premier long métrage d’animation 3D 100 % canadien présenté au cinéma : La légende de Sarila. En 2023, Nancy Florence Savard connaît un immense succès avec son cinquième film, Katak, le brave béluga, qui termine au 4e rang des films québécois au box-office avec des recettes de 1,4 million de dollars.
Quel est ton premier souvenir lié à un film d’animation ?
Je ne sais pas si c’est le premier que j’ai vu au cinéma, mais celui dont je me rappelle le plus, c’est Les Artistochats (The Aristocats, 1970). J’aimais beaucoup l’esprit familial qu’on y retrouvait. Parce que les personnages étaient des animaux, il y avait quelque chose de magique dans cette aventure.
Lequel as-tu vu le plus de fois ?
Le Roi Lion (The Lion King), mais la version 2D de 1994 ! Principalement parce que j’avais de jeunes enfants à cette époque qui voulaient tout le temps le réécouter (rire).
Quel film d’animation t’a marquée ?
C’est Histoire de jouets (Toy Story) ! Premièrement, à cause de son histoire et de la manière dont elle était racontée. Ensuite, c’est le premier film commercial en animation numérique 3D. Je me souviens d’avoir eu la réflexion que nous aussi, nous devions être capables de faire ça ici (rire). Après tout, on développait la technologie et plein d’outils, comme Softimage (un logiciel d’animation inventé par Daniel Langlois).
Quel film est un plaisir coupable ?
Je dirais Who Framed Roger Rabbit (Qui veut la peau de Roger Rabbit). J’adore son mélange d’animation et du réel. Le jeu d’acteur de Bob Hoskins est formidable.
Quel film méconnu considères-tu comme un bijou ?
Ma vie de Courgette (2016) est un film touchant qu’il faut voir. Malheureusement, il n’a pas connu le même succès ici qu’à l’international.
Est-ce qu’un film t’a donné le goût de faire ce métier ?
En fait, ce n’est pas un film comme tel, mais plutôt la technologie. Je travaillais à MusiquePlus quand les possibilités du numérique sont arrivées. Je produisais et réalisais du contenu publicitaire et des émissions pour la chaîne. Pour annoncer un concours, je voulais faire créer une animation 3D d’un calendrier. On nous disait que c’était impossible (rire). Finalement, l’équipe d’animation y est parvenue après avoir passé 80 heures dessus ! Nous étions un peu têtus (rire). Ensuite, nous avons graduellement intégré de l’animation à nos productions. Puis, je suis retournée vivre à Québec où j’ai fondé mon entreprise 10e Ave Productions. Au début, nous tournions des publicités pour des entreprises comme Les ailes de la mode et Tanguay. Et, un jour, en parlant avec quelqu’un de Canal Famille, on me disait que la chaîne était incapable d’acheter des films d’animation étrangers, car ils étaient trop dispendieux. Ça m’est resté dans la tête. Il faut aussi savoir que je suis une grande amoureuse de Ciné-Cadeau. Et, je trouvais dommage que l’on n’y retrouvait pas de films d’animation d’ici. Pourtant, nous avions la technologie et nous pouvions faire de l’animation numérique pour des publicités de 30 secondes. Je me suis donc lancée dans la production d’un premier court métrage de 30 minutes, puis d’un deuxième, d’un troisième et d’un quatrième (rire). Ensuite, j’ai pu produire mon premier long métrage, La légende de Sarila, qui est sorti en 2013.
Quel est le principal défi de produire un film d’animation ?
Il faut être patient (rire) ! Il faut avoir beaucoup de patience afin de mettre tous les morceaux en place : de la conception de l’histoire jusqu’au montage financier. Ensuite, il faut respecter les budgets. Faire un film est un acte de foi (rire). Ça prend aussi énormément de persévérance et d’amour, non seulement envers le projet parce que c’est long, mais entre les membres de l’équipe parce qu’on passe beaucoup de temps ensemble (rire).
Quel film aurais-tu aimé produire ?
Ce n’est pas un film d’animation, mais j’avais trouvé magnifique la production Imax de Cirque du Soleil: Journey of Man. Les numéros d’acrobaties étaient spectaculaires. Ensuite, tout ce qui touche les productions avec de la réalité virtuelle m’interpelle beaucoup. C’est quelque chose que j’aimerais faire un jour. Plus récemment, j’ai adoré la projection en réalité virtuelle du manège de Détestable moi à Universal Studios. J’ai attendu 3 heures en file pour 3 minutes de film, mais ça valait la peine (rire). Je m’émerveille encore très facilement (rire).
Alors que le film d’animation est vu comme une œuvre à part entière en Europe et en Asie, ici, en Amérique du Nord, on le considère encore comme enfantin. Comment expliques-tu cette perception ?
Je pense que c’est lié aux premières productions de l’époque de Disney et à l’image de Mickey Mouse. On associe animation à public jeunesse. De plus, ce sont ces productions qui sont les plus diffusées et qui récoltent de plus grandes recettes aux guichets. Heureusement, il y a des amateurs purs et durs d’animation qui se déplacent pour voir des films pour un public adulte.
D’ailleurs, quel film d’animation « adulte » recommanderais-tu ?
Un de mes coups de cœur est Couleur de peau : miel (2012), un film à propos d’un enfant coréen qui, orphelin, est adopté par une famille belge. Ce documentaire utilise un mélange de prises de vue réelles et des séquences d’animation 2D et 3D. C’est une belle œuvre qui m’avait frappée à son visionnement.
Que peux-tu nous dire de votre prochaine production ?
Nous venons tout juste de commencer l’animation en février (rire). Il s’agit d’une adaptation d’un roman jeunesse, Le Vaisseau des tempêtes, d’Yves Meynard. Pour nous, il s’agit d’une première production qui verse dans le fantastique pur dans lequel il y aura des éléments de magie. Si on est chanceux, il devrait sortir en salles quelque part en 2026 (rire). |