Image tirée du film Frissons (1996)

« Quel est ton film d’horreur préféré? », c’est la « question qui tue » de Ghostface, ce tueur masqué aux allures de fantôme de la série de films à succès Frissons. Ce printemps, il effectuera son sixième retour au grand écran. Et cette fois-ci, Ghostface vise plus haut. En effet, la production dit au revoir à la petite ville ensoleillée de Woodsboro, car le tueur déménage à Manhattan!

Unique en son genre, Ghostface se distingue des autres icônes du cinéma d’horreur par son amour (un peu intense) du genre cinématographique auquel il appartient. En effet, depuis son tout premier bain de sang, dans le film original de 1996, Ghostface a toujours servi de prétexte pour commenter le cinéma d’horreur et pour décortiquer ouvertement ce genre et ses tendances.

Succès critique et populaire, le premier des films Frissons a donné un nouveau souffle à la carrière de Wes Craven, le désormais défunt maître de l’horreur, responsable d’avoir hanté les cauchemars de toute une génération d’adolescents (et de parents) avec Freddy Krueger! De plus, le succès du film a contribué à en propulser bien d’autres. Notons celui de l’actrice canadienne Neve Campbell qui est devenue une vedette des années 90. Puis le scénariste Kevin Williamson, avec son regard jeune et une signature résolument postmoderne, a déclenché une nouvelle vague de films d’horreur, dont Le Pacte du silence et le film culte Les Ensaignants.

« De l’horreur à la science-fiction, en passant par le documentaire, Marco Beltrami enchaîne les projets de genres cinématographiques différents à un rythme qui en effraierait plus d’un. »

Cependant, personne n’aura vu sa carrière changer autant, littéralement du jour au lendemain, que Marco Beltrami. En effet, le compositeur de la trame musicale de Frissons n’avait que très peu d’expérience au moment de créer cette première bande… Si on lui avait demandé le titre de son film d’horreur préféré, sa réponse aurait assurément mis Ghostface en colère puisque Marco Beltrami, avant ce contrat, n’avait jamais regardé un seul film d’horreur!

Aujourd’hui, après plus de 25 ans, la filmographie de Marco Beltrami s’impose par sa quantité (plus de 150 musiques de films à son actif) et sa diversité. De l’horreur à la science-fiction, en passant par le documentaire, Marco Beltrami enchaîne les projets de genres cinématographiques différents à un rythme qui en effraierait plus d’un. Avec l’arrivée du sixième Frissons, le moment ne pourrait pas être mieux choisi pour parler de son œuvre. Et là-dessus, Ghostface serait d’accord : il est grand temps que l’on souligne la carrière du prolifique musicien qui a accompagné, entre autres, tous les élans sanguinaires du tueur masqué.

Un mentor en or
Né en 1966 à Long Island aux États-Unis, Marco Beltrami a, comme de nombreux compositeurs avant lui, démontré un intérêt marqué pour la musique, à un très jeune âge. Doué pour le piano, il prenait particulièrement plaisir à réarranger les partitions plutôt qu’à les interpréter. Il aimait le cinéma, particulièrement les westerns spaghettis et la musique d’Ennio Morricone, mais il n’était pas attiré par l’horreur. Pour vous donner un indice, il dit avoir été profondément troublé dans sa jeunesse par le film Dumbo de Disney.

Lorsque Marco Beltrami a décidé, une fois pour toutes, après quelques tentatives d’études dans divers domaines tels que l’aménagement urbain, de se consacrer à la musique de film, il n’a pas hésité à saisir les occasions qui se sont présentées à lui. Il s’est alors inscrit en composition et il a pu profiter d’une année de stage avec nul autre que le compositeur réputé Jerry Goldsmith (Chinatown et La Planète des singes). En entrevue, lorsqu’on lui demande ce qu’il retient de cette expérience avec Jerry Goldsmith, Marco Beltrami revient sur l’importance que ce dernier accordait aux mélodies et à l’économie de moyens. Il faut faire confiance à son instinct, aller à l’essentiel et ne pas compliquer un processus qui se doit d’être plus émotif que cérébral.

Une rencontre inattendue
C’est le fruit du hasard si la démo de Marco Beltrami est tombée entre les mains de Wes Craven qui cherchait activement un compositeur pour son film Frissons. Impressionné par le jeune compositeur, il décida de le rencontrer malgré le fait que Marco Beltrami n’avait jamais écouté un film d’horreur. Cependant, à sa grande surprise, c’est exactement ce qui a plu au réalisateur. Bien que Wes Craven aurait bien aimé l’engager sur-le-champ, la décision ne lui revenait pas totalement… Il lui a alors proposé de quitter cette première rencontre avec la fameuse séquence d’ouverture du film, celle mettant en vedette Drew Barrymore comme première victime de Ghostface. S’il parvenait, en un week-end, à écrire une partition de treize minutes pour cette scène précise, Wes Craven la présenterait à son équipe de production qui trancherait. Sans trop savoir dans quoi il s’embarquait, Marco Beltrami a accepté et s’est empressé d’emprunter le studio d’un ami pour relever ce défi.

Une semaine plus tard, le contrat lui était donné et sa carrière prenait son envol. Il a ainsi signé la partition musicale des quatre premiers volets de la série, puis de trois autres films de Wes Craven. Malgré son inconfort face aux films d’horreur, il ne peut désormais absolument pas nier l’impact que ces films ont eu sur sa carrière. Avec le temps, il est devenu malgré lui une référence dans le genre. Il faut dire que sa musique est parfaitement incisive, très percussive et, disons-le, ne joue pas dans la subtilité, se prêtant ainsi fort bien à l’intensité des propositions de Craven.

Soulignons enfin que Beltrami a composé de la musique pour presque tous les genres cinématographiques : du film de guerre (Le Démineur) au western (3 h 10 pour Yuma). Ces deux bandes sonores lui ont d’ailleurs valu des nominations aux Oscars. Et maintenant… S’il y a un genre que Marco Beltrami a boudé jusqu’à présent, c’est celui de la comédie romantique. Même si cela est difficile à concevoir, on aurait presque envie de dire à Marco Beltrami : « Il ne faut jamais dire jamais… » ! |

Trending