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Par

Stéphanie Weber Biron

Crédit photo : MarlÚne Gélineau Payette

La direction photo est la pierre angulaire d’un film, sur laquelle reposent de nombreuses composantes de l’image, des dĂ©cors aux maquillages, mais aussi de la direction d’acteurs et de la rĂ©alisation. TrĂšs consciente de son rĂŽle, la directrice photo StĂ©phanie Weber Biron a su se forger une solide rĂ©putation depuis sa collaboration avec Xavier Dolan sur ses deux premiers longs mĂ©trages, J’ai tuĂ© ma mĂšre et Les Amours imaginaires, jusqu’à Lignes de fuite rĂ©alisĂ© par Catherine Chabot et Miryam Bouchard qui prend l’affiche cet Ă©tĂ©.

StĂ©phanie a eu accĂšs, dĂšs son plus jeune Ăąge, Ă  l’appareil photo 35 mm de son pĂšre, qui lui a enseignĂ© la base, geste qui sera dĂ©terminant dans sa vie et ses Ă©tudes Ă  venir. DiplĂŽmĂ©e de la Mel Hoppenheim School of Cinema de l’UniversitĂ© Concordia, StĂ©phanie Weber Biron a aussi explorĂ© le jeu durant son adolescence, en plus de laisser la porte ouverte Ă  la rĂ©alisation. Sachant cela, il n’est pas surprenant de voir Ă  quel point sa camĂ©ra aime les comĂ©diens et les comĂ©diennes qui se retrouvent devant son objectif, ces corps devenant la rĂ©flexion de sa lumiĂšre.

En parcourant la filmographie de StĂ©phanie Weber Biron, nous constatons qu’elle s’intĂ©resse autant au rĂ©el qu’à la fiction, que le format soit court ou long. Elle a aussi travaillĂ© sur des films d’animation, dont Higglety Pigglety Pop! or There Must Be More to Life des cinĂ©astes Chris Lavis et Maciek Szczerbowski, et plus rĂ©cemment sur La Grogne d’Alisi Telengut, montrant sa grande versatilitĂ©.

« Elle possĂšde une comprĂ©hension du travail de rĂ©alisation qui ne peut que l’aider dans sa collaboration avec d’autres cinĂ©astes. »

Elle-mĂȘme rĂ©alisatrice de deux courts mĂ©trages (Gabrielle et Fragments, dont elle est l’une des vedettes) et d’un magnifique documentaire sur les Grands Ballets (Un Ă©tĂ© de danse), elle possĂšde une comprĂ©hension du travail de rĂ©alisation qui ne peut que l’aider dans sa collaboration avec d’autres cinĂ©astes.

En s’attardant Ă  certaines Ɠuvres, nous pouvons voir l’étendue de son talent. S’amusant avec les cadrages dans J’ai tuĂ© ma mĂšre, maĂźtrisant Ă  la perfection toute la richesse que peut permettre un ralenti dans le dĂ©coupage du mouvement dans Les Amours imaginaires, StĂ©phanie Weber Biron n’emploie pas les formules toutes faites. Prenant le temps de s’adapter aux demandes de ses collaborateurs et collaboratrices, cette MontrĂ©alaise s’assure aussi de bien saisir l’essence du projet dans lequel elle s’immerge. La Chambre interdite, une corĂ©alisation de Guy Maddin et Evan Johnson, en est sĂ»rement le meilleur exemple. Ce film choral canadien-anglais au casting surprenant, qui va de Roy Dupuis Ă  la lĂ©gende allemande Udo Kier en passant par la Portugaise Maria de Medeiros, a Ă©tĂ© filmĂ© par StĂ©phanie Weber Biron et Benjamin Kasulke, en partie devant public (!) au Centre Pompidou Ă  Paris et au Centre PHI Ă  MontrĂ©al. Un dĂ©fi de taille, que le format digital permettait, et qui va dans la continuitĂ© des Ɠuvres du grand cinĂ©aste de Winnipeg qu’est Guy Maddin. StĂ©phanie l’a parfaitement compris, travaillant avec doigtĂ© la texture de ses images et le ton surannĂ© de l’ensemble. Un tour de force visuel qui salue l’origine mĂȘme du cinĂ©ma.

Ne craignant pas le risque, StĂ©phanie Weber Biron a su contribuer de façon marquante au succĂšs de Nadia, Butterfly, deuxiĂšme long mĂ©trage du QuĂ©bĂ©cois Pascal Plante. Les scĂšnes chorĂ©graphiĂ©es dans la piscine olympique sont d’une redoutable efficacitĂ©, nous impliquant Ă©motivement dans la derniĂšre course de cette nageuse rĂȘvant d’une mĂ©daille. RecrĂ©er les Jeux olympiques de Tokyo 2020, avec un budget modeste, n’était pas gagnĂ© d’avance. À son tour, StĂ©phanie a pu concrĂ©tiser l’un de ses rĂȘves, soit celui que ses images obtiennent le sceau du plus prestigieux festival du monde, le Festival de Cannes.

DĂšs juillet, vous pourrez dĂ©couvrir sa plus rĂ©cente direction photo dans la comĂ©die dramatique Lignes de fuite, corĂ©alisĂ©e par Catherine Chabot et Miryam Bouchard. Encore une fois, StĂ©phanie Weber Biron semble s’amuser derriĂšre sa camĂ©ra, jouant avec le matĂ©riel trĂšs thĂ©Ăątral de cette adaptation de la piĂšce Ă©ponyme de Catherine Chabot. Il faut voir les scĂšnes en voiture lĂ©gĂšrement dĂ©calĂ©es pour mesurer Ă  quel point elle a bien saisi le ton des retrouvailles de ces trois amies que dĂ©sormais tout oppose. La scĂšne de thĂ©Ăątre se transforme Ă  l’écran en dĂ©finissant des espaces oĂč les personnages semblent prisonniers, obligĂ©s de se confronter les uns aux autres.

En attendant sa vision pour le premier long mĂ©trage de C.S. Roy intitulĂ© VFC, une autre proposition audacieuse qui sortira d’ici la fin de l’annĂ©e, StĂ©phanie Weber Biron semble trĂšs confortable dans le multivers de tout ce qu’elle entreprend. Une directrice photo polyvalente, passionnĂ©e, qui n’a pas fini de nous surprendre. |