Image tirée du film Hamnet (2025)
Dans Hamnet, le nouveau film de Chloé Zhao (Nomadland), Paul Mescal interprète un William Shakespeare endeuillé de son fils de 11 ans. Le film est une adaptation du roman du même nom de Maggie O’Farrell, dans lequel l’autrice affirme par le biais de la fiction que cette mort tragique aurait inspiré au célèbre dramaturge la création de sa pièce Hamlet. Œuvre majeure de son répertoire, Hamlet a été adaptée plusieurs fois pour le cinéma. MonCiné a décidé de revisiter quelques-unes de ces versions.
La première adaptation d’importance à connaître un succès tant critique que commercial est celle du comédien anglais Laurence Olivier en 1948. Quatre ans auparavant, le célèbre acteur avait réalisé un premier film avec sa transposition d’Henry V en Technicolor. Alors que l’Angleterre est plongée en pleine Deuxième Guerre mondiale, le ministère de l’Information, un organisme créé temporairement pour diffuser de la publicité (et de la propagande), demande à Olivier de porter à l’écran cette pièce afin de remonter le moral des troupes et d’affirmer la fierté nationale. Pour son travail, l’acteur et réalisateur reçoit même un Oscar honorifique.
Pour son deuxième film en tant que réalisateur, Olivier décide d’adapter sobrement Hamlet en noir et blanc dans des décors minimalistes. Il s’agit de la première version parlante en anglais. Certains « experts » sont quand même un peu durs avec le comédien. On lui reproche d’avoir omis les éléments plus politiques. À la défense d’Olivier, la pièce a une durée de quatre heures. Il met plutôt l’accent sur le drame psychologique du personnage. Il est aussi celui qui explore le plus le complexe d’Œdipe entre Hamlet et sa mère, alors qu’il choisit l’actrice de 29 ans Eileen Herlie pour incarner la reine, tandis qu’Olivier a 40 ans. Dans plusieurs scènes, on les voit s’embrasser sur les lèvres. La production récolte sept nominations aux Oscars et elle en remporte quatre, dont ceux du meilleur acteur et du meilleur film, un exploit encore inégalé pour une adaptation de Shakespeare.
En 1990, Franco Zeffirelli nous offre sa version plus viscérale avec Mel Gibson dans le rôle du prince tourmenté. Pour le réalisateur, il s’agit d’une troisième adaptation d’une pièce de Shakespeare. En 1967, le metteur en scène italien se lance dans le cinéma en réalisant une version somptueuse de The Taming of the Shrew (La Mégère apprivoisée), en partie financée par le nouveau power couple d’Hollywood : Elizabeth Taylor et Richard Burton. L’année suivante, son Romeo and Juliet connaît un immense succès au box-office, particulièrement chez les jeunes adultes. Sa production ose pour la première fois mettre à l’écran des adolescents dans les rôles-titres : au moment du tournage, Leonard Whiting avait 17 ans et Olivia Hussey, 16 ans.
Il faut attendre 1996 pour enfin voir une adaptation intégrale de la pièce au grand écran. Ce défi audacieux provient de l’acteur et réalisateur d’origine irlandaise Kenneth Branagh.
Avec sa production d’Hamlet, Zeffirelli tente aussi de joindre un public plus jeune, d’où la présence de Gibson, l’une des vedettes les plus populaires d’Hollywood à ce moment. Comme avec ses autres films, le réalisateur offre une œuvre plus sensuelle que cérébrale. Il ne se soustrait pas non plus à l’aspect incestueux de la pièce en donnant le rôle de la mère à Glenn Close, de 11 ans l’aînée de Gibson, qui vient de jouer deux rôles sulfureux dans Fatal Attraction (Liaison fatale, 1987) et Dangerous Liaisons (Les Liaisons dangereuses, 1988). La réalisation du cinéaste est aussi très dynamique, avec des plans écourtés et un montage plus énergique. Apprécié par les critiques, le film connaît toutefois un succès mitigé aux guichets.
Il faut attendre 1996 pour enfin voir une adaptation intégrale de la pièce au grand écran. Ce défi audacieux provient de l’acteur et réalisateur d’origine irlandaise Kenneth Branagh. En 1989, le jeune comédien prodige suit les traces de Laurence Olivier en adaptant Henry V comme première réalisation au cinéma et, tout comme son idole, il est récompensé de nominations aux Oscars dans les catégories du meilleur acteur et du meilleur film. La réussite du film relance l’intérêt d’Hollywood envers Shakespeare, dont on verra plusieurs productions au courant des années 1990. Après l’immense succès de son Much Ado About Nothing (Beaucoup de bruit pour rien) en 1993, Branagh a le poids nécessaire pour faire financer son Hamlet, d’une durée de quatre heures. Le réalisateur opte pour un changement artistique majeur alors qu’il décide de situer l’histoire à l’ère victorienne plutôt que médiévale. Son long métrage est également tourné en 70 mm, qui lui confère un visuel grandiose à la direction photo très lumineuse, encore un contraste avec les productions antérieures. Hamlet obtient quatre nominations aux Oscars, dont celle du meilleur scénario adapté pour Branagh. Considéré par plusieurs comme l’une des meilleures adaptations shakespeariennes, le film ne trouve malheureusement qu’une distribution limitée en salles et il devient un échec commercial.
S’inspirant du Romeo + Juliet de 1996 de Baz Luhrmann, Michael Almereyda signe en 2000 une version d’Hamlet ultrastylisée qui se déroule dans un New York contemporain tout en gardant le texte original de la pièce. Incarné par Ethan Hawke, le personnage est un étudiant en cinéma qui voit son oncle prendre le contrôle de la corporation familiale. Les caméras (vidéo, Polaroid et de surveillance) et la technologie sont au cœur du film. Âgé de 29 ans au moment du tournage, Hawke est le plus jeune Hamlet au cinéma et le plus proche en âge du rôle, alors que dans la pièce, le héros a 30 ans. Si la critique souligne la réalisation intelligente d’Almereyda, plusieurs trouvent toutefois la performance de Hawke un peu trop rigide. |
Le drame historique Hamnet prend l’affiche le 12 décembre.

