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Superman 1978 : le défi de faire voler un superhéros

Image tirée du film Superman (1978)

You’ll believe a man can fly!” (« Vous croirez qu’un homme peut voler ! ») Telle est la promesse qui ornait l’affiche du film Superman de 1978. Avec un budget de 55 millions de dollars, le plus élevé à Hollywood à ce moment-là, les producteurs Ilya Salkind et Pierre Spengler étaient prêts à tout pour relever ce défi technique afin d’émerveiller les cinéphiles qui s’enthousiasmaient encore pour Star Wars, sorti un an plus tôt.

À la suite du succès de leur diptyque The Three Musketeers (Les Trois mousquetaires, 1973) et The Four Musketeers (On l’appelait Milady, 1974), Salkind et Spengler souhaitent adapter le comic Superman pour le cinéma, une première sous forme de long métrage. Ironiquement, ce ne sont pas des Américains qui veulent porter à l’écran l’un des symboles les plus populaires de la culture américaine. Ilya Salkind est mexicain aux origines russo-juives et Pierre Spengler, français. Les discussions avec Warner Brothers, qui détient les droits de Superman, s’avèrent compliquées alors que le studio se montre très soucieux quant au respect de l’image de l’iconique personnage. Pour le rassurer, les producteurs lui offrent un droit de regard sur toutes les étapes de la production, incluant même les dialogues du scénario !

À l’été 1976, la production s’installe à Rome au célèbre studio Cinecittà, où l’on amorce la construction de décors et l’on expérimente sur la technologie, qui s’avérera peu concluante, pour faire voler Superman. Plus de deux millions de dollars sont déjà dépensés quand un pépin majeur vient chambouler la production : Marlon Brando ne peut pas tourner en Italie ! Désirant démontrer le sérieux de la démarche artistique, la production avait courtisé l’acteur afin d’incarner Jor-El, le père de Superman (Kal-El). Depuis son succès dans The Godfather, qui a relancé sa carrière, Brando se montre très gourmand financièrement. Il accepte le rôle en échange du montant faramineux de 3,7 millions de dollars et 11,75 % des profits du film. Tout ça pour seulement douze jours de tournage ! De plus, il est convenu que l’acteur n’aura pas à mémoriser ses répliques. Elles seront inscrites sur de gros cartons aide-mémoire. Finalement, Brando apprend qu’un mandat d’arrestation a été établi contre lui en Italie depuis le scandale lié au film The Last Tango in Paris (Le Dernier tango à Paris, 1972). On déménage donc la production vers l’Angleterre, ce qui causera le départ du réalisateur Guy Hamilton.

Amateurs de James Bond, les producteurs avaient embauché Guy Hamilton, réalisateur de Goldfinger (1964), le film le plus populaire de la franchise à ce moment-là. Maintenant que la production s’installe à Londres, Hamilton ne peut y travailler, puisqu’il est un expatrié fiscal. Il est donc remplacé par Richard Donner, un réalisateur vétéran de la télévision qui vient de connaître un grand succès avec le film d’horreur surnaturel The Omen (La Malédiction, 1976). En plus de tous ces pépins, un problème n’a toujours pas été réglé, et non le moindre : qui incarnera Superman ?

Pour le regretté Christopher Reeve, ce rôle de Superman a été celui d’une vie, auquel il sera toujours associé.

C’est le directeur de casting Lynn Stalmaster qui suggère en premier Christopher Reeve, un acteur de théâtre de 24 ans en pleine ascension à Broadway. Malgré les 6 pieds 4 pouces du comédien, Donner le trouve trop jeune et maigrichon. Alors que la production peine à trouver son Superman, Stalmaster convainc finalement Donner de faire un essai filmé avec Reeve. Le jeune acteur émerveille tellement le réalisateur que ce dernier lui donne le rôle. Alors qu’on suggère au comédien de porter un costume de corps musclé sous son habit de Superman, il entreprend plutôt un strict régime de musculation qui fait augmenter sa masse musculaire et son poids. Toutefois, il n’y a pas de Superman sans son alter ego Clark Kent. Pour jouer l’affable journaliste, Reeve s’inspire de la personnalité plus légère de l’acteur Cary Grant. Selon l’acteur, « l’image masculine avait changé à la fin des années 1970. Il était maintenant acceptable pour un homme de démontrer de la douceur et de la vulnérabilité ». Pour le regretté Reeve, ce rôle de Superman a été celui d’une vie, auquel il sera toujours associé.

Quant au défi de faire voler Superman, plusieurs techniques sont employées pour réaliser cette illusion. Pour ses arrivées et ses envols, on utilise un système de câbles et de poulies hors champ. Les effets où il vole vers ou loin de la caméra sont réalisés par des zoom in et zoom out jumelés à des mouvements de caméra sur rails devant un fond bleu. Finalement, pour les séquences où l’on suit Superman voler dans les airs, mais où il demeure statique, une image est projetée en arrière-plan de Reeve suspendu horizontalement. Pour son travail sur le film, l’équipe des effets visuels se verra décerner un Oscar honorifique.

Il est impossible du parler du succès du film sans aborder la question de la musique. Jerry Goldsmith, qui avait collaboré avec Richard Donner sur The Omen, doit composer la musique du film. Mais la production prend du retard et lorsque le moment vient pour Goldsmith de travailler sur le film, il est déjà occupé par un autre projet. Salkind et Spengler frappent alors un grand coup en embauchant le compositeur le plus en demande du moment : John Williams. Ce dernier vient de créer la musique de deux films iconiques des dernières années : Jaws (Les Dents de la mer, 1975) et Star Wars (La Guerre des étoiles, 1977), pour lesquels il vient de recevoir deux Oscars. Amusé par la proposition, il accepte. Le thème héroïque de Superman devient l’un des plus reconnus du cinéma.

À sa sortie en décembre 1978, Superman: The Movie (Superman, le film) fracasse plusieurs records du box-office pour le studio Warner Brothers, comme ceux des recettes du meilleur premier jour (2,8 millions) et du premier week-end (7,5 millions). Avec des recettes cumulées mondiales de 300 millions de dollars, le film est, à ce moment-là, la production la plus populaire de l’histoire du studio. Acclamé par les critiques et le public, Superman: The Movie demeure encore très apprécié malgré des signes de vieillissement évidents. Aujourd’hui, on tient pour acquis ce que l’on voit sur grand écran. La technologie numérique a révolutionné les effets spéciaux. Mais les artisans du film Superman ont réussi à nous faire rêver qu’un homme pouvait réellement voler. |

Superman sortira au cinéma le 11 juillet.