CrĂ©dit photoâ: Unifrance
Entrevue avec le cinĂ©aste Chakib Taleb Bendiab et l’acteur Nabil Asli pour la sortie du film Alger.
Premier long mĂ©trage du scĂ©nariste et rĂ©alisateur franco-algĂ©rien Chakib Taleb Bendiab, le suspense policier Alger se dĂ©marque Ă lâinternational, alors quâil a remportĂ© le Grand Prix du meilleur film au 28e Festival international du film de Rhode Island. Il Ă©tait Ă©galement la sĂ©lection de lâAlgĂ©rie pour la catĂ©gorie de lâOscar du meilleur film international. Mettant en vedette le populaire acteur algĂ©rien Nabil Asli, le film est une vĂ©ritable course contre la montre afin de retrouver une fillette qui a Ă©tĂ© enlevĂ©e.
Votre film, Alger, emprunte beaucoup aux codes du cinĂ©ma amĂ©ricain. Ătait-ce une volontĂ© dĂšs le dĂ©partâ?
Chakibâ: Oui. Je voulais offrir un film algĂ©rien diffĂ©rent. Je suis un grand fan de thrillers. En AlgĂ©rie, il y a beaucoup de films dâauteur. Je voulais un peu plus de folie qui se colle plus Ă notre style de jeu mĂ©diterranĂ©en (rire).
Lâhistoire est-elle inspirĂ©e de faits rĂ©elsâ?
Chakibâ: Ă la fin des annĂ©es 1990, pendant la guerre civile algĂ©rienne ou dĂ©cennie noire, quand jâavais 16-17 ans, on entendait parler de ces histoires dâenlĂšvements dâenfants. Ăa mâintĂ©ressait de raconter comment on reconstruit un pays Ă la suite dâun traumatisme. Je voulais aussi des personnages de deux classes sociales diffĂ©rentes quâon ne voit pas souvent dans notre cinĂ©ma, tout en Ă©vitant les clichĂ©s sur les relations hommes-femmes souvent associĂ©s Ă notre culture. La rĂ©alitĂ© est plus complexe que ça.
Quâest-ce qui est venu en premierâ: le dĂ©sir de tourner un thriller ou ces enlĂšvements dâenfants qui vous ont menĂ©s vers votre histoireâ?
Chakibâ: CâĂ©tait lâactualitĂ© du moment. Il y a quatre ans, jâĂ©tais en visite Ă Alger pour un festival de cinĂ©ma dans lequel je prĂ©sentais un court mĂ©trage. Jâai grandi lĂ -bas, mais je demeure en France. JâĂ©tais donc sur le balcon de ma chambre dâhĂŽtel et, aux nouvelles, il y avait cette histoire dâenlĂšvement. Ăa mâa donc replongĂ© dans cette pĂ©riode de mon adolescence oĂč la police avait de la misĂšre Ă intervenir pendant cette dĂ©cennie noire, car elle Ă©tait souvent ciblĂ©e par une partie de la population. Son travail Ă©tait trĂšs difficile. Aujourdâhui, elle peut sâoccuper de ces cas. Dâailleurs, notre film est le premier Ă avoir eu lâentiĂšre collaboration de la police. Nous avons eu accĂšs Ă des archives en plus de pouvoir observer le travail des policiers sur le terrain. Petite anecdoteâ: la sĂ©quence dâouverture du film a Ă©tĂ© tournĂ©e sur le mĂȘme balcon de chambre dâhĂŽtel quâĂ lâĂ©poque. Le plan de la voiture qui part Ă la recherche de sa proie voulait Ă©voquer le requin dans Les Dents de la mer (rire).
Nabil, vous ĂȘtes une vedette Ă©tablie chez vous. Quâest-ce qui vous a sĂ©duit dans ce projetâ?
Nabilâ: Lâargent (rire)â! Câest un sujet dur qui bousculait les codes de notre cinĂ©ma. Jâai aussi toujours voulu faire un thriller et lâoccasion sây prĂȘtait. En pleine lecture du scĂ©nario, je me suis dit que je voulais jouer dedans.
«âJe voulais offrir un film algĂ©rien diffĂ©rent. Je suis un grand fan de thrillers. Je voulais un peu plus de folie qui se colle plus Ă notre style de jeu mĂ©diterranĂ©en.â»
– Chakib Taleb Bendiab
Comment avez-vous trouvĂ© cette expĂ©rience de tourner avec Chakib, pour qui il sâagissait dâun premier long mĂ©trageâ?
Nabilâ: Chakib est trĂšs convaincantâ! Il tournait un premier long mĂ©trage ambitieux, mais il Ă©tait prĂ©cis et pointu. Il nâhĂ©sitait pas Ă poser des questions. DĂšs quâil arrivait dans un dĂ©cor, il savait oĂč placer les camĂ©ras. Il savait ce quâil voulait.
Chakib, avez-vous ressenti une certaine pression en rĂ©alisant ce premier filmâ?
Chakibâ: La pression Ă©tait plus avant de tourner. Nous nâavions pas un grand budget et je voulais offrir de bonnes conditions Ă ceux qui travaillaient sur le film. Je voulais aussi quâils y adhĂšrent et soient motivĂ©s pendant la production. Je mâĂ©tais beaucoup prĂ©parĂ© en amont. Nous avons rĂ©pĂ©tĂ© trois semaines avant. Surtout, il fallait demeurer positif et souple, car tout peut changer Ă la derniĂšre minute iciâ: des autorisations refusĂ©es, des changements de lieux, etc. Câest quand mĂȘme compliquĂ© de tourner en AlgĂ©rie, encore plus au centre-ville dâAlger (rire).
Nabil, Ă©tait-ce un rĂȘve de gamin de jouer un rĂŽle de policier toujours plongĂ© au cĆur lâactionâ?
Nabilâ: CâĂ©tait un plaisir de faire ce film. Il y a eu plein de moments que jâapprĂ©ciais. Nous avons utilisĂ© de vrais pistolets, sans balles Ă©videmment (rire). Mais on sentait leur poids. Quand on les mettait Ă notre taille, on prenait de quoi (rire)â! Il y a aussi la scĂšne de la poursuite dans le marchĂ©. Ă lâĂ©cran, elle dure deux ou trois minutes, mais jâai couru pendant trois jours (rire)â!
Chakibâ: Dâailleurs, cette scĂšne a Ă©tĂ© complexe Ă tourner. Nous avons fait un tournage sauvage oĂč les camĂ©ras Ă©taient cachĂ©es. Nabil ne pouvait courir quâune vingtaine de secondes avant que les gens ne le reconnaissent et veuillent prendre des selfies en sa compagnie (rire).
Nabilâ: Je devais leur dire que je ne me sauvais pas rĂ©ellement, mais que je tournais un film (rire). |
Le suspense policier Alger est prĂ©sentement Ă lâaffiche.
