Crédit photo : Guillaume Larose
Martin LĂ©on est devenu petit Ă petit un compositeur fort sollicitĂ© par le milieu du cinĂ©ma quĂ©bĂ©cois. Cet automne, on pourra apprĂ©cier le fruit de son rĂ©cent travail lors de la sortie du film Tu te souviendras de moi dâĂric Tessier, qui met en vedette RĂ©my Girard et Karelle Tremblay. Rappelons-nous quâĂ la fin des annĂ©es 90, Martin LĂ©on sâest fait connaĂźtre comme coleader du groupe Ann Victor, aux cĂŽtĂ©s de la chanteuse et comĂ©dienne GeneviĂšve Bilodeau.
Cette aventure Ă©phĂ©mĂšre lâamĂšne Ă se lancer en solo, lâartiste faisant paraĂźtre successivement trois albums de chansons, Kiki BBQ, Le Facteur vent et Les Atomes. Puis, voilĂ maintenant douze ans, son chemin bifurque vers le cinĂ©ma, Martin LĂ©on rĂ©pondant avec joie aux appels de nombreux rĂ©alisateurs quĂ©bĂ©cois sĂ©duits par sa grande crĂ©ativitĂ©. Voici un petit rĂ©sumĂ© de la trajectoire de Martin LĂ©on, accompagnĂ© de ses confidences sur sa façon de crĂ©er des musiques de films.
«âQuand jâĂ©tais adolescent, je voulais faire de la musique de film, mais mon amour des mots, ceux de Brassens, Brel, Desjardins et Leloup, a fait que je me suis enfargĂ© dans le monde de la chanson. AprĂšs quelques albums, jâai retrouvĂ© mon amour premier, celui de la musique au cinĂ©ma. Travailler pour un collectif â car un film, câest ça â, ça mâapporte beaucoup. Ăa mâa rĂ©Ă©quilibrĂ©. RĂ©pondre Ă une commande de film, ça ne mâempĂȘche pas dâĂȘtre tout aussi crĂ©atif. Jâai dâailleurs constamment de la musique qui roule dans ma tĂȘte. Je suis nĂ© comme ça.â» Câest dans ces mots que Martin LĂ©on rĂ©affirme son bonheur de concevoir diffĂ©rentes musiques pour des films quĂ©bĂ©cois. Son lien avec le cinĂ©ma ne date Ă©videmment pas dâhier puisque lâartiste a eu la chance, en 1995, de suivre un sĂ©minaire de sept semaines en Italie auprĂšs dâEnnio Morricone, le plus reconnu des compositeurs de musiques de films. Dans le journal Le Devoir, en juillet 2020, lors de lâannonce de la mort du compositeur italien, Martin confiait avoir retenu plusieurs leçons du maĂźtre, dont celle-ciâ: «âIl y a des moments oĂč le compositeur doit se retirer au bĂ©nĂ©fice du film. La musique doit ĂȘtre immense Ă certains moments et trĂšs petite Ă dâautres. Nous ne sommes pas au service de notre ego, mais au service du film.â»
Une leçon quâil a retenue et qui lui a permis en 2010 de faire son entrĂ©e au cinĂ©ma en signant les musiques du Journal dâAurĂ©lie Laflamme, film adaptĂ© de la sĂ©rie jeunesse dâIndia Desjardins. La comĂ©die est un succĂšs en salle et lâartiste reçoit lâoffre dâĂ©crire les partitions musicales de Monsieur Lazhar, la prochaine rĂ©alisation de Philippe Falardeau, avec lequel il dĂ©veloppera une grande complicitĂ©. Martin LĂ©on se rappelle leur premiĂšre rencontreâ: «âCâĂ©tait pendant la tournĂ©e de Kiki BBQ. Ă la fin du spectacle, Philippe est venu me voir en coulisses. On ne se connaissait pas. On a discutĂ©, on a ri. Je lâai trouvĂ© intelligent, sensible, pertinent et je suis finalement devenu le parrain de sa fille.â» Une belle collaboration sâensuivra puisque Martin composera pour le cinĂ©aste les musiques de cinq de ses films, dont celles de Monsieur Lazhar et de Guibord sâen va-t-en guerre qui lui permettront de gagner Ă deux reprises le prix de la meilleure musique originale au Gala QuĂ©bec CinĂ©ma. Tout rĂ©cemment, il signait les musiques de la sĂ©rie Le Temps des framboises, Ă©galement rĂ©alisĂ©e par Falardeau. Entre-temps, Martin aura travaillĂ© sur les musiques dâEmbrasse-moi comme tu mâaimes dâAndrĂ© Forcier, des Ătres chers dâAnne Ămond, des 3 Pâtits Cochons 2 de Jean-François Pouliot et de Merci pour tout de Louise Archambault.
Son plus rĂ©cent travail au grand Ă©cran est rattachĂ© au film Tu te souviendras de moi, dont la sortie a Ă©tĂ© repoussĂ©e depuis plus de deux ans et demi Ă cause de la pandĂ©mie. Lâartiste se souvient dâavoir Ă©tĂ© approchĂ© par le rĂ©alisateur du film, Ăric Tessier. «âJâavais lu le scĂ©nario Ă lâĂ©poque et le rĂ©alisateur mâa exposĂ© ses idĂ©es sur la façon dont il voulait adapter la piĂšce de thĂ©Ăątre de François Archambault pour le cinĂ©ma. Moi, je travaille souvent Ă partir du scĂ©nario. Au fil de ma lecture, je note dans un carnet les choses que jâentends dans ma tĂȘte. Puis, je demande au rĂ©alisateur sâil a des musiques de rĂ©fĂ©rence Ă me suggĂ©rer et ensuite je lui joue ce que jâai en tĂȘte Ă la guitare ou au piano. Ăric, lui, voulait avoir un thĂšme qui revient ici et lĂ pendant le film. Un thĂšme, pour moi, câest une musique quâon peut siffler. Ăric avait aimĂ© ceux que jâavais composĂ©s pour les films de Philippe Falardeau. Câest lors dâun voyage au Mexique, avec ma guitare, que jâai finalisĂ© les musiques. Ăa me prenait un thĂšme un peu mystĂ©rieux, un peu onirique, car le film parle de la maladie dâAlzheimer, de lâimpression de disparaĂźtre, de sâeffacer. Il fallait aussi que ça demeure un peu lumineux et tendre Ă la fois.â» Ce sont ces mots-clĂ©s qui allaient dĂ©finir les musiques du long mĂ©trage.
Martin LĂ©on sâattĂšle prĂ©sentement Ă crĂ©er un nouvel album de chansons, qui devrait voir le jour en 2023. Il composera Ă©galement, dans les semaines Ă venir, les airs du prochain film dâAnne Ămond, La Meute (Ă©galement tirĂ© dâune piĂšce de thĂ©Ăątre, celle de Catherine-Anne Toupin). Lâartiste fort actif conclura ainsi lâentretienâ: «âJâaime les ĂȘtres humains et chaque rĂ©alisateur, chaque rĂ©alisatrice possĂšde son propre univers poĂ©tique. Jâaime habiller leurs mondes. Mon travail est salutaire et jâaime partir Ă la dĂ©couverte de ce que les autres ont Ă mâoffrir. Les gens inspirĂ©s mâinspirent!â» |